La revue belge In Vino Véritas a crée une rubrique sur les accords cigares/vins.
Il s'agit de la rubrique :

Vino y Puro : Chroniques fumeuses
" Partagas, Serie du Connaisseur n°1 "

On dit ce module démodé et même moribond... Et pourtant, ce " palma larga ", petit frère des célèbres " Lanceros " de Cohiba et " Especiales N° 1 " de Monte-Cristo, mérite que l'on s'y attarde tant il a été apprécié par nos dégustateurs. Partagas, on le sait, produit des cigares solides voire même très costauds. Mais la puissance " made in Partagas " que l'on retrouve dans ce " Connaisseur N° 1 ", se voit équilibrée par des notes certes riches mais qui parviennent à assumer pleinement un foisonnement aromatique intéressant et même complexe : épices, cuir, fruits secs... Un cigare qui se fume aisément malgré un diamètre qui pourrait l'handicaper. Cigare de bonne longueur et d'excellente persistance en bouche : Le signe qu'il résulte, aussi, d'une sélection rigoureuse des meilleurs " vegas " de l'île...

Patrick Fiévez

 
 

L'habit ne fait pas le moine
Un rayon de soleil cuivré me caresse le dos, le mois de septembre retrouve ses rendez-vous attendus.
Pipo rouvre son petit club aux ambiances "tabacgeuse".
Est-ce la proche rentrée ou autre chose, mais ce soir ne sont présents que Marcianne et Monsieur Zevief. Heureusement, ce cher Pipo, retenu malencontreusement chez le fraiseur, a laissé sur la table quelques longs modules de Partagas que notre professeur émérite taxe d'entrée de désuet.
Mais allumons ce grand dégingandé, ses 192 mm nous démangent les doigts. Les trois premières bouffées passées, la révélation d'un Partagas qui "a étudié en Suisse" éclate. L'élégance et déjà la complexité augurent d'une agréable suite.
Vite, versons-nous à boire!

Les Vignes Oubliées du Mas Jullien, Coteaux du Languedoc blanc 1998, éclairent les verres de leurs reflets nacrés. Minéral, pamplemousse et fruits blancs rencontrent la fumée poivre gris. Le chocolat blanc poursuit l'élan. Fraîcheur et sapidité harmonisent l'unisson jovial. Un rien de sel donne un ultime croquant.
La cape grasse roule entre les doigts. Partagas Série du Connaisseur n°1 raconte ses histoires de cacao grillé, écrite sur une /feuille de tabac frais. Le récit est long, la langue puissante, la matière profonde.

La Cuvée du Temple du Château Bas, Coteaux d'Aix blanc 1998, transforme sa vanille, son abricot, sa pêche en écorce de citron vert au contact du tabac. Une image de garrigue naît dans le nuage bleuté. Grillé et boisé flirtent sur un lit minéral et découvrent le moelleux d'un pain d'épice. Une légère amertume soutient la structure.
Les millimètres se consument avec plus de douceur encore, tout en gardant leur tonus.

Du fruit bien mûr colore d'un grenat profond la transparence du cristal. Le "Tradition" du Domaine des Schistes, Côtes du Roussillon Villages 1997, étale sa générosité avec la retenue qui sied aux âmes bien nées. Sa vivacité agréable tempère les ardeurs du havane et canalise cette énergie pour la confection de biscuits chocolatés dont le sablé laisse une rugosité taquine sur la langue. Les fruits reviennent à la charge et clôturent cette belle rencontre.
Au coeur du deuxième tiers, poivre vert, muscade, cannelle et cardamome agrandissent l'éventail des nuances.

Marcianne et Monsieur Zevief, très impressionnés par la vitole décident de monter les enchères et imposent au cubain l'hyper-riche Minervois "AR 26" du Château d'Oupia.
Très gras, une matière imposante, alcool et tanins mûrs s'érigent en obstacles gourmands. La muraille résiste un instant, mais rien n'y fera. Ce puro, provenant des meilleures "vegas" et sorti des mains de "torcedores" de septième catégorie, s'insinue, s'enroule et finit par renforcer l'impression de plénitude déjà grande. La bouche s'emplit d'un moelleux incomparable, une fraîcheur épicée apporte la grâce.
Début du troisième tiers, le naturel revient doucement. La famille Partagas rattrape son enfant prodigue. Terre mouillée et suc de viande apportent un soupçon de rusticité.

Le Seewinkel Bouvier Beerenauslese 1992 de Rudolf Payer accorde ses faveurs sucrées, sa cascade d'agrumes où la chair de citron jaune domine. Iode et safran gâtent le havane qui peut s'endormir confortablement installé dans un moelleux noble.
Pas si vite!

" Cette fois, comme le patron n'est pas là, je voudrais mettre mon vin à table. Je suis certain qu'il s'accordera avec le bout qui reste " déclare le chef (chez Pipo, une petite restauration cubaine et sud-américaine est proposée en-dehors des rencontres fumeuses).
Marcianne et Monsieur Zevief éclatent de rire en voyant la bouteille. Moi, qui lit de loin "Fin Gourmet Spécial Cuisine", j'ai du mal à retenir un sourire complaisant. Quel farceur cet Ignacio!
Mais le cuisinier, guère embarrassé par la moquerie, attend.
Le liquide ambre pâle coule dans les verres, les nez plongent, les lèvres goûtent, deux regards étonnés scandent caramel, noix verte, poivre noir, curry, un rancio sec!
On ranime les dernières rougeurs du Partagas, le Banyuls lui tend une main secourable, celle de l'amitié qui naît parfois, par hasard, une amitié profonde qui ne durera qu'un instant mais qui est forte et inoubliable. Chacun apporte à l'autre cette force de caractère rare, c'est l'étonnement. Merci Ignacio.

De l'habillage
Pourquoi une étiquette aussi ringarde pour un produit de cette qualité. La question se pose et ne trouvera ici qu'un postulat en guise de réponse. Il est à supposer que le Cellier des Templiers considère ce rancio sec comme un bas de gamme et ne veut lui prêter un habillage plus adéquat. Monsieur Zevief est persuadé que relooké (ça c'est mode) cette bouteille ferait un tabac (on en sort pas).
Pour en terminer avec ce mélodrame, voici le petit texte inscrit sur l'étiquette, à droite d'Ignacio, le cuisinier: Ce vin a été élaboré exclusivement à partir de raisins récoltés par nos vignerons. Il a vieilli de longs mois dans de vieux fûts en chêne selon un procédé typiquement local. Le goût de rancio qu'il a acquis le rend inimitable pour la cuisinière qui veut réussir sauces et marinades et soigner particulièrement ses repas.

A propos du Partagas Série du Connaisseur n°1
Un cigare mince qui n'a l'air de rien, au module presque suranné et qui, allumé, enchante le plus aguerri des amateurs. Ce puro a tellement de relief et de complexité qu'il s'adapte à tous les types de vin (à partir du moment où ces derniers possèdent également matière et richesse aromatique).
De plus, malgré sa minceur, il ne présente aucune difficulté de tirage et garde tout au long de sa courte vie élégance et persistance.

Orujo V.

Les Membres du Club recevront également, outre la revue IVV, un "news letter" reprenant conseils d'achats, revue de presse (livres, magazines) et différentes rubriques régulières (comme "les restaurants qui aiment les cigares"). Un lien unique et se voulant chaleureux pour les "aficionados" des beaux modules et des bons flacons ! Pour plus amples renseignements : vinoypuro@skynet.be

Texte : Orujo V. et Patrick Fiévez .Article reproduit avec l'aimable autorisation de
Philippe Stuyck
, In Vino Véritas

Haut de page

Nous attendons de vos nouvelles!
Texte In Vino Veritas . Réalisation S. Poulart .
Mise à jour 23.02.2001