Dégustation du 13 decembre 1999
Les grands vins rouges Californiens
Quelques commentaires de contexte (vins américains)
:
- Sauf mention contraire, les vins ne sont pas dégustés
à l'aveugle .
- Ordre de service descendant en fonction du millésime.
- Nombre de dégustateurs : une vingtaine.
- Vins américains de prestige (chers), assemblage de type
bordelais.
Ordre de dégustation :
1- Robert Mondavi Réserve 95 :
Note : 17,5 vers 18 - prix : 450 F
Cabernet Sauvignon.
Robe présentant des signes déjà notables d'évolution.
Nez superbe, intense complexe et très racé (de type
Lafite). Des notes envoûtantes bien définies et nobles
de poivron vert, de bois aromatique (santal, cèdre), de fruit
(cassis), d'herbes aromatiques. Un côté oriental.
Bouche très médocaine, équilibrée et
racée. Des notes complémentaires de menthol (voire
d'eucalyptus), de cuir, d'herbe sèche, de tabac, se développent
sur une grande longueur. Elles attestent une évolution relativement
rapide du vin dans le temps.
Le plus médocain des 6 vins dégustés, du niveau
d'un premier cru. Il semble toutefois avoir évolué
rapidement. Déjà excellent, son optimal n'est pas
atteint mais sa garde ne se fera peut-être pas sur plusieurs
décennies. A retester dans quelques années (5 à
10 ans).
2- Joseph Phelps - Insignia 95 :
Note : 17.5 vers 18 - prix : 720 F
90% CS - 7% CF- 3% petit verdot.
Robe nettement moins évoluée que dans le cas précédent.
Nez évoquant moins le cabernet. Certains dégustateurs
évoquent la syrah (notes florales et épicées),
d'autre le zinfandel (eucalyptus). Notes intenses de fleurs, de
tabac, d'épices, de fruit (cassis, raisin sec). Un côté
goudron (notes empyreumatiques de brûlé). Un dégustateur
évoque le nez des cuvées hommage à Jacques
Perrin de Beaucastel (profondeur, concentration, gamme aromatique).
La bouche ne possède ni la race ni la finesse du vin précédent.
Elle est plus en puissance et concentration, un peu lourde. Des
notes de poivre, de fumée. On détecte (de manière
très subtile) des notes brûlées et un très
léger sucre résiduel.
3- Shafer Hillside Select 94 - Stag's Leap district
:
Note : 18 vers 18.5 - prix : 695 F
100% CS - 14,5°.
Robe très intense et foncée.
Nez très intense et semblant surgir des profondeurs. Il semble
concilier les notes des 2 vins précédents. Notes de
surmaturité, un côté eucalyptus, camphre.
La bouche encore jeune signe un vin long et vibrant, offrant des
notes un peu brûlées. Les dégustateurs sont
partagés sur sa fraîcheur (certains lui reprochent
une certaine lourdeur, une finale un peu chaude). Unanimement, c'est
un vin qui impressionne par sa concentration.
4- Philip Togni 94 :
Note : 16,5 vers 17 - prix : 300 F
12,5°.
Robe opaque.
Le nez rappelle de nouveau le médoc. Si Mondavi réserve
95 présentait des notes nobles de poivron, celui-ci s'exprime
ici de manière un peu caricaturale et nettement moins racée.
Des senteurs organiques (rognon frais), de tabac, de rose.
La bouche est bien équilibrée (elle paraît plus
fraîche avec un degré alcoolique plus bas à
12,5°), complète et correctement articulée. Moins
complexe et plus courte que celle de Mondavi réserve 95,
elle se termine sur des notes marquées de zan.
5- La Jota 93 - cuvée du 12ème anniversaire
(cuvée haut de gamme) :
Note : 16 vers 16.5- prix : 280 F
Robe noire.
Nez complexe : menthol, fruit, organique (rognon), tabac, mine de
crayon. Une senteur truffée pointe.
En bouche, on observe des notes de fruits confiturées (dominante
cassis), crémeuses et minérales (craie). Le vin est
assez long mais paraît plus simple et un peu exubérant.
Sa finale est légèrement alcooleuse.
6- Opus One 86 (Robert Mondavi) :
Note : 16 vers 15,5 - prix : 1200 F
Une cuvée très célèbre élaborée
en collaboration avec l'équipe de Mouton-Rotschild
Robe normalement évoluée.
Nez bordelais, tertiaire et complexe, exhalant de belles notes de
poivron, de cassis et de fruits à l'eau de vie, de café,
de cacao, d'herbes aromatiques et de tabac.
Bouche manquant toutefois de race. Sur le déclin, elle s'avère
usée, manquant de corpulence et de longueur. Elle évoque
un 1er cru classé bordelais dans un mauvais millésime.
C'est incontestablement une déception. On souhaite à
Mondavi réserve 95 une plus grande longévité.
7- Dominus Estate 86 (Christian Moueix) :
Note : 15 vers 14,5 - 950 F
80 % merlot et 20 % CS
Robe évoluée, sans plus.
Nez intense exprimant des notes de cassis, de cacao, de fruits à
l'eau de vie, d'herbe séchée, de menthol, de sous-bois,
de truffe. Il semble malheureusement de plus que l'aération
essoufle le vin.
Illustrant une seconde déception, la bouche s'avère
peu agréable, marquée par un peu de sucre résiduel.
Les notes de bouquet séché, de noyau sont corrompues
par un mélange de sécheresse et d'amertume. Des notes
pharmaceutiques agressives complètent le tableau. Malgré
une relative jeunesse, cette bouteille apparaît fatiguée,
dépassée. Niveau qualitatif aux antipodes de l'objectif
d'excellence et de prestige d'une telle cuvée.
Autres vins dégustés :
8 - Jurançon Clos Thou - "suprême
de Thou "96 :
Note moyenne : 16 vers 16,5 - Prix : 70 F
Bouteille de 75 cl.
Robe dorée et brillante de vin jeune.
Nez puissant et superbe évoquant les fruits exotiques, la
viande grasse (rillette), la truffe noire.
Bouche ample, déclinant des notes végétales,
grasses, exotiques (ananas, citron vert). Elle se révèle
puissante mais très bien équilibrée par sa
trame acide qui, associée à ces notes truffées
entêtantes, signe l'appellation. Un très bon vin possédant
un beau potentiel de garde. Quand on songe aux grands liquoreux
du monde, on apprécie encore plus son rapport qualité/prix.
9 - Jurançon - "Cancaillau "- gourmandise
96 :
Note moyenne : 15 - Prix : 85 F
Robe brillante.
Nez sur la mangue, la nèfle, le pralin, la truffe.
La bouche est moins complète, plus végétale.
Contrairement à la dégustation effectuée **en
début d'année, le bois masque quelque peu le fruit
(qui éclatait littéralement au nez - vin noté
17). Le vin est moins racé et semble plus court, avec une
finale un peu chaude. A regoûter dans quelques années,
pour juger de l'évolution apparemment capricieuse du boisé.
10 - Jurançon Clos Thou - "suprême
de Thou 95" :
Note moyenne : 16 vers 16.5- Prix : 60 F
Bouteille de 50 cl.
Jolie robe jaune fluorescent.
Nez proche des précédents, exotique et gras. Une pointe
végétale (géranium).
En bouche, les dégustateurs sont partagés. Il me semble
pour ma part moins riche et moins dense que son successeur sur le
millésime 96, avec une bonne acidité mais des notes
plus végétales (une petite amertume de peau de pamplemousse
en finale) et moins friandes (ma note est de 14,5 seulement). Le
verre vide continue à délivrer des notes anisées.
Cela étant dit, nous avons goûté à plusieurs
ce même vin la semaine dernière et l'avons trouvé
très gourmand et noté entre 16,5 et 17 (serait- il
en train de se refermer ?).
11 - St-Chinian - Domaine Moulinier - les Sigillaires
98 :
Note moyenne : 14 vers 14,5 - Prix : 70 F
Assemblage languedocien - sol argilo-calcaire ? (absence de notes
de garrigue).
Robe évoluée un peu terne.
Nez peu noble, vineux pour des notes de fleurs (violette) et de
chocolat.
Bouche soyeuse mais sans grand charme, dont la finale est marquée
par l'amertume du zan.
12 - VDP D'Oc - Domaine de la Jasse VV 98 :
Note moyenne : 14.5 vers 15- Prix : 45 F
Robe foncée.
Nez très intense, confituré. Des notes légères
de garrigue, florales et d'agrumes.
Bouche équilibrée et de bonne longueur. Des notes
de goudron, une finale un peu amère sur le zan.
13 - St-Chinian - Domaine Moulinier - Les terrasses
grillées 98 :
Note moyenne : 16 vers 16.5 - Prix : 165 F
80% syrah, 20% mourvèdre - la cuvée haut de gamme
du domaine.
Robe opaque.
Nez complexe et massif entremêlant des notes minérales
(mine de crayon), boisées (lactiques) et confiturées.
Des notes complémentaires de fruit (cassis) et de violette.
Bouche concentrée et prometteuse mais fermée exprimant
parcimonieusement des saveurs de chocolat, de goudron, de zan. De
l'équilibre, de la longueur et, c'est important par rapport
aux notes lourdes précédemment citées, une
fraîcheur salvatrice confèrent à ce vin un beau
potentiel de garde. A attendre, bien sûr.
Une des cuvées phare du grand Languedoc, sur un millésime
annoncé comme exceptionnel. Bien mais devient (très)
cher.
14- Barolo Cerequio Roberto Voerzio 95:
Note moyenne : 15 vers 15.5 ?- Prix : 280 F
Robe présentant des signes d'évolution précoce.
Nez peu charmeur mais profond sur l'amande, la rose fanée
et le cuir.
Bouche manquant de fruit et aromatiquement surprenant. Une belle
matière soyeuse mais moyennement expressive, manquant d'un
soupçon d'acidité et surtout relativement courte développe
des notes un peu lourdes et manquant d'élégance de
cuir, de châtaigne, de goudron (ici encore, l'évolution
se fait sentir et la rose fraîche cède le pas à
la rose fanée).
Ce vin qui apparaît compact et fermé est à revoir
dans 5 à 10 ans. Il est souhaitable que cette austérité
juvénile s'estompe. Ancien ou nouveau style de vinification,
il est difficile d'identifier en l'état un barolo.
15- Sauternes Château Guiraud 1959 :
Note moyenne : 16,5 - Prix : 420 F (enchères)
Très jolie robe cuivrée (reflets verts) et brillante.
Nez évolué très agréable : écorce
d'orange, cire, raisin et abricot secs, confiture de rose.
Bouche soyeuse et encore fraîche, mais un peu abrupte (longueur
moyenne). Des notes d'agrumes, de caramel, et une finale réglissée.
Un léger manque d'acidité. Ce Guiraud à boire
n'est pas le meilleur des vieux Guiraud (on pense aux fabuleux 45,
57 et 62 que nous avons notés au dessus de 18/20, cette trilogie
exceptionnelle ponctuant une verticale du domaine de grande qualité).
Il constitue toutefois une très belle bouteille d'un âge
respectable, à savourer pour elle-même (comme nous
l'avons fait) entre oenophiles célébrant un anniversaire
de naissance.
Conclusion (pour les vins américains) :
- De très bons vins à l'évidence, représentatifs
des cuvées d'excellence aux US, sans être pour autant
de production confidentielles.
- Pour la plupart, prix (trop) élevés, exagérés
par l'importation.
- 2 millésimes 86 précocément usés (moins
en terme de millésime - il faut comparer ce qui est comparable
qu'en terme de longévité potentielle sur plusieurs
décennies (quel avenir pour Mondavi réserve 95 ?).
- Tenir compte du fait que la vinification a progressé outre-atlantique
en plus de 10 ans.
- A part Mondavi réserve 95, très typé bordelais,
des vins un peu plus exubérants (un peu lourds et alcooleux
pour certains, titrant 14° - mais voir le millésime
89 à Bordeaux, gorgé de soleil).