Les temps premiers

1. La vigne : Des fruits qui se méritent.

 

Il existe environ 60 espèces de vignes (vitis) pour l’ornement, le fruit ou le vin . Une seule prospère en Europe, la vitis vinifera sylvestris. Elle étend son aire jusqu’en Asie occidentale et centrale.
31 sont originaires principalement d’Amérique du Nord, le reste d’Asie
(Chine, Inde, Corée, Indonésie, Népal, Viêt-Nam, Sibérie, Mandchourie, Sikkim et Japon).

Notre vigne européenne est une plante sarmenteuse s’étalant sur le sol ou s’élevant jusqu’à 10/ 20 m et plus avec support.

Son milieu de prédilection est l’orée des bois de chênes, association prémonitoire ; elle a besoin de lumière et de soleil pour fructifier. Les pieds de vignes sauvages sont soit mâles ou femelles, la sélection au cours des millénaires va favoriser les formes dioïques donc autofertiles.

Dans les premiers vignobles, la vigne pousse en fouillis, directement sur le sol. Elle est parfois palissée sur des échalas ou elle se hisse directement sur les arbres plantés pour cela dans les vignobles romains, la récolte du raisin dans ce cas est acrobatique et les vendangeurs réclament des primes de risque, et l’octroi de frais de funérailles et une tombe décente.

Domestiquée, elle est la seule qui soit capable de donner des vins de qualité, bien que certains cépages actuels aient emprunté ici et là quelques gênes vagabonds d’autres espèces Nord Américaine.


Il y à 5750 générations de cela la période glaciaire : l’absence.

2. La vigne dans notre pays - 100 000 - 10 000 ?
Un temps frisquet : " dit monsieur, dessine-moi un bison " - le règne du renne.

Le prétendu rustre et solide homme de Neandertal arrivé vers - 150 000, est rejoint par le doué et élancé homme de Cro-magnon vers -45 000 ans. La disparition de notre néandertalien est située vers -30 000. Ils ont donc cohabité pendant plus de 15 000 ans. La population subsistant serait-elle devenue métisse ?

Certains auteurs avancent que la vigne qui pousse à l’état sauvage dans notre pays aurait permis à Cro-magnon ou à son métis de découvrir le vin.

D’autres prétendent que vers -600, à l’époque où les Celtes abordaient notre pays par le nord-est, les grecs de Phocée accostaient les rivages provençaux et languedociens avec dans leurs bagages des pieds de vigne domestiqués. Quelques historiens avancent qu’à la même époque, les étrusques auraient introduit eux aussi des plants de vigne sur notre sol via la Suisse.

L’écriture avant l’écriture.

À partir de - 35 000 les hommes de Cro-magnon ont montré une créativité géniale dans la représentation des animaux sauvages sur les parois des grottes du Lot, du Tarn, de la Dordogne, des Pyrénées, de la vallée du Rhône et des bords de la Méditerranée. Chaque site est l’expression de la sensibilité de ces artistes anonymes.

On reste confondu par la sûreté et le modernisme du trait des peintures et gravures proche de certains peintres actuels comme Picasso, Matisse ou Modigliani.

Ils ont utilisé le relief de la roche pour accentuer la perspective et le vivant des représentations à Lascaux, aux Combarelles, Font-de-Gaume, Niaux, Chauvet (où les représentations suggèrent le mouvement), la Madeleine, la Roque St Christophe, la grotte Cosquer (découverte en 1991, l’entrée de cette dernière est située actuellement à 37 mètres sous le niveau de la mer. Elle était accessible à pied sec entre -30 000 et -15 000 au moment de la réalisation des peintures rupestres). Ce sont les cathédrales de la préhistoire Altamira en Espagne, dans la province de Santander, la chapelle Sixtine. (P Picasso déclarait au sujet de ses fresques, qu’aucun artiste de son époque n’était capable de peindre comme cela). Toutes ces représentations sont souterraines.

Au nord-est du Portugal, dans la vallée du Côa, un affluent du célèbre Douro (Porto), le site de Foz Côa découvert en 1992 expose au soleil depuis 20 000 ans les silhouettes du bestiaire local. À Cussac en Dordogne c’est bien à l 'abri sous terre que les plus grandes gravures connues (prés de quatre mètres pour les plus importantes) ont été découvertes en septembre 2000.

Les fresques rupestres sont les livres de la préhistoire.

En dehors de l’utilisation première comme abris, ces grottes méritent le qualificatif de bibliothèques et de cathédrales car il est évident que quelques-unes ont été des lieux de cultes, de cérémonies voire de concerts dont on ne connaît rien du déroulement. Il a été mis en évidence que la particularité d’amplification de la résonance et de l’écho de certains endroits de ces grottes avait été répertoriée et utilisée pour les cris, les grognements, les chants, les incantations au cours de pratiques, ou réunions qui resteront inconnues pour nous, (peut être à caractère religieux et magique se rapprochant du Chamanisme) le tout accompagné du son des flûtes (à sept trous réalisés dans de longs os creux de volatiles), de l’arc musical, de percutions et autres tam-tams primitifs.

À l’époque de Néandertal et Cro-magnon, les conditions climatiques sont extrêmement rudes et ne vont se modifier que dans la toute dernière période de leur présence sur notre sol.

La dernière glaciation de Wûrn (du nom d’un affluent du Danube) a débuté vers -100 000, elle prendra progressivement fin vers -10 000.

Les glaciers recouvrent la Scandinavie, la Belgique, la Hollande, l’Angleterre, l’Allemagne du Nord, la limite de cette épaisse calotte glaciaire oscille suivant la rigueur du climat de quelques centaines de kilomètres, la plus septentrionale passe par Dublin, York, Berlin, la plus méridionale par Cork, Londres, Prague. Le massif Alpin est lui aussi totalement couvert par les glaces.

Plus au sud, le sol est gelé en profondeur et est recouvert de neige plus de 6 mois par an. Le niveau de la mer est 100 à 120 mètres en dessous du niveau actuel, on traverse la manche à pieds secs et la mer du Nord se résume en un chapelet de lacs modestes entre Angleterre et Danemark. Le climat est sibérien, la France est chauve de ses arbres, il ne subsiste qu’une végétation de toundras, de steppes. Dans le Sud-Ouest et le pourtour Méditerranéen, une pauvre couverture arbustive avec de maigres conifères profitent de conditions climatiques un peu plus clémentes.

Un grand fleuve alimenté par la Seine, la Meuse, le Rhin, l’Elbe passe au centre de la Manche et va se jeter dans l’Atlantique entre Finistère et Cornouaille. Les terres émergées agrandissent notablement l’Ouest de notre pays, la Loire et la Garonne retrouvent l’Atlantique 150 ou 200 kilomètres plus loin et le secteur du Languedoc-Roussillon s’avance hardiment dans la Méditerranée. Dans les plaines, les rennes abondent, les mammouths fréquentent la côte d’azur et les phoques les eaux très froides de la rivièra, quant à la vigne, elle a disparu depuis fort longtemps. Vers -10 000 ans, le climat se rapproche du nôtre.


Il y à 550 générations de cela

3. La vigne : le retour. Le réchauffement : petite fleur qui borde le chemin.
Les racines de la vigne.
Les prémices agricoles et de la cuisine.

Plus au Sud, la flore de climat tempéré à du mal à survivre en écosystème restreint sur les sites les mieux protégés du pourtour méditerranéen, de la Mer Noire et de l’Afrique.

Dans la région transcaucasienne, en Arménie, Géorgie et Azerbaïdjan, les botanistes soviétiques ont retrouvé près de 60 variations de vitis vinifera sylvestris, ce qui tendrait à prouver que cette région a été un sanctuaire pour la vigne et ses compagnes aux exigences climatiques comparables. Mais il y en a eu certainement d’autres (en Afghanistan, au Cachemire et en Afrique du Nord).

Quelques ampélographes distinguent trois sous espèces originelles :
  • Une, dans la région caucasienne ou proche caucasienne, la vitis viniféra pontica de (Pont-Euxin, Mer Noire), base possible du cépage sans pépins de Corinthe et du cinsault.
  • Une au Nord-Ouest de l’Inde, la vitis viniféra orientalis, ancêtre supposé du réputé chasselas et de la sultanine qui produit un excellent raisin sec apyrène (sans pépins).
  • La dernière en Asie mineure, Afrique du Nord, Haut Nil, la vitis viniféra occidentalis, qui serait à l’origine des Chardonnays, Gamays, Cabernets, et autres Pinots.

Une récente étude de l’INRA et de l’ONF sur l’ADN des chênes rouvres en Europe a démontré que cette espèce disparue avec la glaciation avait mis entre 6 000 et 8 000 ans pour reconquérir l'Europe à dater du réchauffement climatique général, à partir de sites refuges situés en Espagne du Sud, Italie du Sud et de zones des Balkans proches de la Mer Noire.

Vers -8 000 apparaît le bouleau, le saule, le mélèze, le pin, le noisetier qui retrouvent plus vite leur habitat. Ce sont des espèces pionnières, elles préparent le sol aux espèces plus exigeantes, le chêne, l’orme, le tilleul puis viennent le charme, le noyer et enfin le sapin et le hêtre vers seulement -3000/-2500 car ils ont besoin du couvert des précédents dans leur jeunesse. Cette reconquête de la flore connaît des progressions et des régressions dues aux fluctuations climatiques dont la périodicité est à peu prés connue.

Quant à la vigne sauvage, elle avance en même temps que les autres végétaux.

Les quelques dizaines de milliers d’hommes de Cro-magnon (plus ou moins 20 000 individus) et leur civilisation vont bizarrement connaître des difficultés d’adaptation avec le réchauffement. Ce dernier va profondément modifier le mode de vie, la chasse, la nourriture de nos ancêtres. Ce qui était gelé devient boueux et les fleuves de glace redeviennent liquides provocants de terribles inondations, les mers submergent d’énormes surfaces et tout cela semble-t-il sur une période très courte que certains scientifiques estiment à une quinzaines d’années. La flore va se transformer et le garde-manger se modifier. La faune habituelle a désertée le pays et suivi la remonté des glaces (Rennes, bœufs musqués et mammouths), remplacée par une autre (aurochs, bisons, sangliers, chevaux, lapins et cervidés) vers -6000/-5000.

Vers - 5000 - 2500 le niveau monte de plusieurs mètres par siècle, la Baltique la mer du Nord et la Méditerranée occupent peu à peu leur territoire actuel et l’Angleterre devient une île

Les premiers Cro-Magnons ont été rejoints entre -45 000 et -5000 ans par différentes vagues de petites colonies de chasseurs-cueilleurs, les dernières arrivées étaient certainement des agriculteurs ou pré-agriculteurs. Dans notre pays, entre les premières tentatives agricoles et pastorales et l’arrivée des Romains, la forêt passe de 90 à 75 % du territoire. Des régions entières restent fermées, presque inhabitées. La sylve gauloise ne ressemble en rien à nos forêts actuelles faites d’une seule espèce. Ce sont des bois clairs, grouillant de vie où sous une strate d’arbres dominants, de chênes en particulier, pousse une large palette d’arbres de deuxième ou troisième grandeur, d’arbustes, de plantes sarmenteuses (vignes) ou grimpantes, avec d’importantes colonies de plantes vivaces et de graminées.

C’est à la lisière de cette silva et dans les clairières vers -6000 /-5000 que les premiers agriculteurs, en plus de la cueillette de la pêche de la chasse et du ramassage des coquillages sur les bords de mer, feront les premières tentatives de semis de céréales après brûlis préalables et travail grossier du sol aux bâtons à fouir dont la pointe a été durcie au feu, (évolution spontanée ou après rencontre de migrants venus de la région du croissant fertile où cette évolution agricole a commencé quelques millénaires plus tôt) ? Plus tard on utilise des houes et crocs en bois et vers -2500 ans les premiers araires toujours dans le même matériau. Les pasteurs de leur côté feront paître dans les clairières les ancêtres de nos porcs, chèvres, moutons et bovins. Ce pâturage forestier va se perpétuer jusqu’au XVIIe siècle. (Dés le haut moyen âge les parcelles forestières étaient évaluées en fonction du nombre de porcs qu’elles pouvaient nourrir, Là la glandée était la ressource principale et les fruits revêches et âpres des pommiers sauvages encore abondants à cette époque sont appréciés des vaches et des cochons).

Du feu aux 35 heures 

Si les incendies ont fait découvrir à nos ancêtres qu’une viande cuite était plus savoureuse que crue, avec la maîtrise du feu (entre -1 000 000/-500 000 ans) leur menu, c’est notoirement transformé. La viande, le poisson, les végétaux sont cuits, les femmes innovent, améliorent les préparations, les assaisonnements, les cuisons, ajoutent sel et plantes aromatiques, confectionnent bouillies, rôtis et soupes de plus en plus appétissantes (pour cette dernière, il faudra attendre quelque temps pour faire chabrol ou chabrot) et tout ça pour la plus grande satisfaction de l’homme devenu gourmand, peut-être gourmet !

Mais pour cela il faut des cabanes, des granges, des outils, des ustensiles et surtout se sédentariser et cultiver la terre.

Un couple d’historiens chercheurs M et V Guignard essaient depuis quelques années à Limeuil au cœur du Périgord de retrouver les gestes, les pratiques, les outils qu’utilisaient nos ancêtres pour cultiver les plantes sauvages qu’ils avaient sélectionné ainsi que les techniques et ustensiles nécessaires à la cuisine. Passionnante démarche qui permet de comprendre l’importance d’un simple bâton à fouir, d’une mince lame de silex presque translucide comme couteau, d’une pierre taillée parfois emmanchée pour devenir hache, houe ou pioche, d’une simple tige de bois en guise de broche ou d’une galet utilisé comme meule pour écraser le grain ou que l’on met au feu et quand il est devenu brûlant (chauffé à blanc), on y dépose la viande à rôtir ou on le glisse dans les pots en terre remplis de bouillies ou de soupes à cuire, ces récipients étant incapables de supporter une flamme nue.

Fini le temps de l’insouciance où seule la pêche, la chasse et la cueillette pourvoyaient au nécessaire journalier. Maintenant on stocke la nourriture, on sale, on sèche, on fume pour la conserver. La femme tient l’homme par la " gueule " : il vient de tomber dans la tyrannie du travail. Cette capacité à produire va engendrer le troc puis la monnaie, sans oublier les notions de possession, de clan, de tribu, qui amène rapines, guerres, défaites, victoires, traités, héros, médailles et pollution. À méditer…

La population évaluée à 500 000 individus au temps des premiers balbutiements agricoles dans ce qui va devenir la Gaule passe à 7 millions à l’époque de Vercingétorix.



Il y à 130 générations de cela, la période Antique

4. Les débuts de la vigne civilisée. L’âme du vin repose dans le cépage, le terroir lui donne sa personnalité, le millésime est son destin. Histoire de clone.

La vigne sauvage comme d’autres végétaux a suivi des chemins de reconquête similaires aux chênes l’aventure s’est poursuivie dans, ou à la lisière des forêts, des Pyrénées, du Sud-Ouest, de la vallée du Rhône, de la Bourgogne, du Dauphiné, d’Alsace, des coteaux de la Moselle et du Rhin, en Allemagne et Belgique. Assez rustique, les -15° à -20° ne lui font pas peur lors du repos végétatif, mais moins de 2° aux périodes des gelées blanches printanières et c’est la récolte qui s’envole.

Les romains affirmaient que les cépages introduits venant de régions chaudes comparables à la Côte d’Azur ou au Languedoc ne pouvaient guère fructifier au-delà de la zone de culture de l’olivier.

À Vienne, Beaune, Reims, Colmar ou Bordeaux, il a fallu que la vigne s’acclimate avec des sélections et croisements locaux ou venus d’autres horizons.

L’allobrogica et le biturica, plus résistants au froid et à l’humidité, lui permettront de s’aventurer avec succès sur le reste du territoire. Le premier vers le Nord, c’est peut-être l’ancêtre de la Mondeuse, de la Syrah, le second à l’Ouest, vers Bordeaux supposé père du Cabernet.

Pour l’Allobrogica de la province de Vienne il y a de grande chance que la sélection soit locale. Les secteurs de la vallée du Rhône et du Dauphiné se trouvent à une frontière climatique entre :zone méditerranéenne et zone semi-continentale. Pline et Columelle y remarquent en leur temps diverses variations indigènes de la vitis viniféra. Les habitants, les Allobroges ont manifesté très vite un vif intérêt pour la vigne et la vinification. César (-100/-44) et l’écrivain Varron (-116/-27) confirment lors de leur passage la présence d’un vignoble bien établi au Nord des Cévennes.

Pour le Biturica, ou Biturigiaca. La région bordelaise ne possédait pas, semble-t-il, de population indigène de lambrusque. L’importation de cépages venus d’Espagne (Biscaye) est possible la vigne a été introduite et cultivée par les Phéniciens du côté de Cadix bien avant que les Phocéens fassent de même du côté de Marseille ; on avance également une arrivé avec les Bituriges peuple Celte qui avaient fondé auparavant Bourges ? Sans oublier la source Albanaise.

Moins connu le Carbunica fait le bonheur des Helviens de la région d’Alba en Ardèche (Alba la Romaine au sud d’Aubenas était particulièrement florissante durant les premiers siècles de notre ère, elle va totalement disparaître avec l’écroulement de l’empire romain. Elle réapparaît au moyen âge sous le nom d’Aps, puis redevient Alba en 1903 seulement). Issu d’une vendange tardive le vin était très capiteux et plaisait énormément à Pline l’ancien (on tordait le pédoncule quant le raisin était mûr et on laissait la grappe plusieurs semaines sur le cep, les grains se figeaient).

On compte actuellement plus de 6 000 cépages encore existants. (P. Galet en décrit plus de 9 600). La vigne manifeste des capacités de mutation très grandes. Les gênes peuvent s’agencer en de multiples combinaisons, les cépages nouveaux peuvent être sélectionnés à partir d’une population sauvage ou à partir d’un semis.

La plus grande collection de cépages du monde se trouve au Domaine de Vassel, entre Sète et Marseillan ; elle en rassemble plus de 3 800 dont la plus grande partie est reconnue, les ampélographes ont malgré tout encore du pépin à identifier !

D’autres stations aussi sauvegardent, étudient, hybrident et multiplient les cépages. Le Domaine du Chapitre, à Villeneuve-les-Maguelone, l’Université du Vin à Suze-la-Rousse, la Pépinière de plants agréés certifiés, l’ENTAV, près de Montpellier.

D’évolutions en variations

La population d’un cépage dans une appellation est rarement homogène, elle présente des mutations parfois importantes. Le Pinot Noir par exemple, de Bourgogne, d’Alsace ou de Champagne, présente des différences notables de port, de vigueur, de fertilité, de grosseur de grappes, de coloris, de découpe de feuillage et de précocité. Ces différences sont le fruit d’une adaptation au sol, au climat et d’une dérive au cours des siècles suite aux choix des vignerons dans la sélection des boutures ou des greffons pour les plantations ou les replantations. On élimine les faibles, les malades. On conserve les plus productifs, les plus vigoureux, les plus sains, les plus sucrés, les plus colorés…. Cela s’appelle la sélection massale.

Faut-il conserver un seul clone comme représentant d’un cépage ? Source d’uniformité, c’est la sélection clonale ou au contraire préserver les mutations les plus intéressantes ? C’est de dilemme entre la sélection clonale mise en œuvre par les allemands depuis 1876 et la sélection massale, pratique ancestrale faite sur le terrain.

Il existe par exemple actuellement 31 clones agrées et certifiés pour le Chardonnay, 11 d’Ugni Blanc, 20 de Sauvignon, 10 de Melon, 7 de Sémillon, 8 de Chenin, 50 de Pinot Noir, 32 de Gamay, 21 de Cinsaut, 20 de Grenache noir, 15 de Merlot, 25 de Carignan, 25 de Cabernet Sauvignon, 35 de Cabernet Franc, 16 de Syrah, 15 de Meunier.

Tous ne sont pas systématiquement multipliés. Quelques-uns plus que d’autres c’est peut-être là qu’existe le danger d’uniformisation, en outre la qualité ne semble pas être uniforme certains cépages ont des clones de grande qualité, pour d’autres cela semble être globalement moins évidant. (Quelques vignerons entretiennent des collections privées de cépages oubliés ou de sélections massales maisons non certifiées. Pour ces dernières, il peut les multiplier ou demander à un pépiniériste de le faire à la condition de garder pour lui les plants. Dernière solution, en faire cadeaux à l’E N T A V, mais là il perd le bénéfice de sa découverte, qui tombe dans le domaine public).

L’avenir du vignoble français pour le 3e millénaire se joue dans ces établissements.

Actuellement en France, parmi les 250 cépages de cuve et taille cultivés, une centaine ont une importance économique notable pour le vin. Les 16 cités plus haut représentent plus de 80 % des surfaces.

Que les cépages les plus en vue se retrouvent dans toutes les appellations ne présente pas forcément un grand intérêt, outre l’acclimatation à réussir encore que le greffage amène plus de souplesse. Les vins produits ont de grandes chances de présenter un air de déjà goûté.

Le vin est le résultat du temps d’une année et du travail du vigneron. Il est nécessaire de préserver la biodiversité des cépages et l’originalité des vins de chaque appellation, de chaque terroir.


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Texte Marc Vernageau. Réalisation S. Poulart . Mise à jour 01.12.2001